Etre dans le secteur de la mode en Afrique, surtout en RDC, pour les jeunes filles est un risque courant sur les stéréotypes et les abus sexuels, qui restent en actualité malgré tout. Pourtant, Epogracial Bahati, mannequin et encore étudiante continue de croire que le système peut changer et reste ambitieuse pour sa carrière. Elle rêve plus que Goma, sa ville et RDC, son pays. Elle veut être une célébrité mondiale dans le secteur de la mode.
Sourire éclatant, peau noire, 1 mètre 70 et devant plusieurs centaines d’invités, Epogracial Bahati a attiré l’attention lors de la troisième édition de la Femme Fashion Show, le 9 juillet dernier, à l’hôtel Serena à Goma. Ce rendez-vous annuel de la mode, qui s’est tenu pour la première fois en dehors de Bukavu, vise à mettre en lumière le talent féminin de la mode et soutenir sa créativité au-delà de messages de paix et de cohabitation pacifique qu’il ne cesse de prôner.
Epo comme plusieurs dizaines de filles invitées à cette soirée, a défilé dans la peau de plusieurs stylistes nationaux et internationaux. C’était son énième podium pourtant, six ans plutôt, elle a été victime de sexisme de la part de ses premiers collaborateurs. Alors qu’elle dirigeait ses collègues mannequins de l’agence Nd’Su Fashion Agency, dans laquelle elle a effectué ses débuts, un mauvais comportement de la part de l’un de ses collaborateurs va lui pousser à claquer la porte rapidement. « Je n’ai pas aimé la manière dont on me traitait. Ils pensent que les femmes ne sont pas capables de gérer quelque chose », dit-elle avant de souligner la goutte qui a fait déborder le vase : « Etant capitaine de l’agence, je conduisais notre équipe et de ma part, je faisais bien les choses. Et puis, il y a un jour, un gars est venu et a balancé : comment une fille peut être cheffe or il y a des garçons ? c’est ce qui m’a poussé à quitter l’agence »
« Au départ, je voulais juste devenir Miss… »
Après ce baptême de feu, Epogracial a décidé d’évoluer en solo. Depuis cette première expérience, elle a participé dans les évènements de la mode au niveau de la ville de Bukavu. Parmi eux, l’édition précédente de The One Fashion Week, dont elle a été même l’égérie et a été invitée, en 2019, au Kigali Fashion Week au Rwanda.
« Je ne vais pas dire que c’est quelque chose qui me passionne depuis que je suis petite », révèle Bahati. « Au départ, je voulais juste devenir Miss et puis après, je suivais plus les mannequins que les miss sur les réseaux sociaux. J’aime beaucoup la mode, j’aime beaucoup le faire », a-t-elle continué. Comme l’avait souligné Ayena Denise Valérie dans une interview avec culturebene, « Lorsqu’on est mannequin, on est qu’un cintre, on va dire qui, représente une œuvre d’un créateur. Tandis que lorsqu’on est miss, on représente notre culture générale et notre attitude ». Epogracial a donc fait son choix entre les deux. Un choix pourtant qu’elle ne cesse de nourrir d’ambitions. « J’ai toujours voulu être un mannequin et designer à la fois. J’aime créer des petites choses, de modelés, créer une marque », souligne-t-elle, sourire aux lèvres.
Pour l’instant, le domaine de la mode tarde à s’imposer devant les autres disciplines artistiques qu’au niveau de la RDC ou de l’Afrique malgré une petite évolution dans certains pays. Au Nigeria par exemple, Pour valoriser ses talents, le pays le plus peuplé du continent africain, pôle majeur de l’industrie du divertissement, privilégie désormais les mannequins locaux dans ses publicités. Une tendance que beaucoup d’autres pays africains devraient adopter. Mais malgré le manque de revenus dans le domaine, Epo crois en ses rêves et reste ferme : “ Certainement, c’est un domaine qui ne paie pas encore chez nous mais j’aime faire ça et je crois que ça payera un jour”
Autre difficulté auquel les jeunes filles mannequins se confrontent au quotidien, au-delà du sexisme, ce sont les préjugés de la société. « Le mannequinat est un travail qui nous expose et cela pousse les gens à nous juger », a déploré Epogracial. « Malgré tout, je reste objective et focus sur ce que je fais. J’ai toujours rêvé de devenir une célébrité et je crois que je suis sur une bonne lancée »
Spoiler : Elle prépare sa première exposition photo qui parlera sur le féminisme, le sexisme en milieu du travail. « Je vais lancer un message aux femmes et aux filles de mon âge, d’autres gens disent qu’on est à vendre pourtant ce sont les habits que nous portons qui sont à vendre et pas nous. Beaucoup de gens ne poursuivent pas leur rêve dans le mannequinat à cause des préjugés. Moi je reste focus », souligne-t-elle. Pour la date et les autres détails sur l’exposition, elle dit vouloir rester silencieuse à présent.
Inspirée plus par les models féminins du mannequinat, Epogracial Bahati, qui poursuit encore son cursus universitaire, rêve de faire la couverture du célèbre magazine Vogue, de par l’Afrique et le monde entier.